Lundi matin, Vilcabamba. Avant de quitter ce charmant village, je prends un petit déjeuner sur la place centrale. Je fais alors (brièvement) la connaissance d’Iseha, un jeune américain du New Jersey fraîchement débarqué en équateur. Il est venu prêter mains fortes à un couple de ses compatriotes gérant une ferme dans la vallée. Nous trinquons à Joe Biden et je file dans mon bus, qui me dépose à Cuenca dans l’après midi.

J’ai opté cette fois pour une auberge de jeunesse sur les bords de la rivière, avec une grande terrasse, et surtout au calme, afin d’éviter les désagréments de la précédente…

L’hostal Selina est propre et soigné, et mon dortoir tout à fait correct. J’ai néanmoins un colocataire : Mark, un américain lui aussi, lui aussi originaire du Colorado. C’est un drôle de personnage. J’apprends qu’il est sur les routes depuis 10 ans. En fait, il a pris la tangente après son diplôme, procrastinant son entrée dans la vie réelle. Il flotte ainsi d’un pays à l’autre depuis une décennie, dans un langoureux rêve éveillé qu’il porte dans son regard. Un sympathique hurluberlu. Je le laisse à son monde et m’installe confortablement sur la terrasse. J’établis un plan d’action pour gérer au mieux la préparation de mon voyage aux Galápagos (ma dernière décennie à moi s’est déroulée entre salle de réunion et Microsoft office, on ne se refait pas…). Afin de me récompenser de mes efforts, je m’offre un merveilleux restaurant équatorien, le Guajibamba, et me régale de spécialités locales. Je rentre profiter du calme de l’auberge pour une belle nuit de sommeil.

Mardi matin, de bonne heure, je vais prendre le petit déjeuner au café Nucallacta, où le patron m’accueille en habitué (j’y suis déjà venu deux fois la semaine passée). Je digère mes pancakes en marchant vers la place San Blas, l’un de mes lieux préférés à Cuenca, mon bureau pour ce matin. Il fait un temps splendide et la place est curieusement animée pour un matin de semaine.

Je retourne à l’hôtel à l’heure du déjeuner afin de profiter du wifi pour continuer mes recherches. J’y fais la connaissance de Clara et Vincent, un autre couple de français fort sympathiques. Je précise ici que je ne m’abstiens nullement de converser avec des aventuriers venus d’un autre pays que le mien. Mais force est de constater que nos compatriotes semblent bien les seuls européens à braver la pandémie pour découvrir le monde…Aubaine, ils connaissent les Galápagos et me renseignent, me faisant ainsi gagner un temps précieux. Dans la foulée, je contacte un hôtel sur place pour m’aider avec les (nombreuses) formalités nécessaires pour se rendre aux îles. Je pars ensuite vers la clinique « Latina », d’où je ressors lesté cinq minutes plus tard d’un peu de mucus et de 120$. Je passe le reste de l’après-midi à flâner et à bouquiner au soleil, entre les bords de la rivière et la place San Blas.

Pour le dîner, je me rends dans un restaurant chaudement recommandé par Julie et Sylvain, à deux pas de l’auberge. Le « a pedir de boca » est une vraie découverte ! La nourriture y est superbement originale, le service est magnifique, et le chef / propriétaire des lieux est un homme remarquable, aux milles vies. Il me raconte tout cela, en Italien, et nous passons un excellent moment à bavarder dans cette langue qui m’est chère. Je rentre à l’hôtel, saluant le couple à l’accueil d’un « buena notte » qui détonne un peu.

Mercredi matin, Cuenca. L’excitation monte. J’ai eu une nuit agitée malgré le calme irréprochable de l’endroit. En bon fan de documentaire animalier, les Galápagos, c’est un rêve d’enfance pour moi. Rien d’étonnant alors d’avoir le sommeil perturbé à l’approche de sa réalisation ! Ce matin, j’ai envie de marcher. Je rejoins donc, à pieds, le village thermale de Baños de Cuenca, à 8km au nord-ouest. Je me remets de mes efforts en alternant piscine à 35 degrés et bains turcs, dans un complexe thermal sans charme. Le personnel n’en a pas non plus (ils sont même franchement désagréables). Je ne m’attarde donc pas et reprends la route, et le sourire, en devinant celui des locaux sous leurs masques lors de mon passage. L’après midi se passe essentiellement sur la terrasse, à discuter longuement avec Ma-bé, une équatorienne volontaire dans l’auberge qui distille aussi des cours de Yoga. La discussion est un peu hachée, entre mon mauvais espagnol et son anglais balbutiant, mais sympathique. Elle me laisse pour aller méditer (je ne m’offusque pas) et resurgit alors Mark. L’occasion pour moi de revoir mon jugement (un peu hâtif) sur le bonhomme. Il fait preuve d’une bien plus grande lucidité et ouverture que je ne l’avais pensé au premier abord. Nous refaisons donc le monde, avec réflexion, humour, et second degré.


Pour le dîner, je décide de poursuivre sur ma lancée volubile et retourne au « pedir de boca » afin de continuer la conversation de la veille avec Felip, le cuisinier polyglotte. Une soirée égale à la précédente dans la qualité de son contenu (y compris dans l’assiette). Je profite de Cuenca : demain je pars pour Guayaquil, sur la côte, d’où part mon vol pour les îles Vendredi matin !


Jeudi matin, hostal Selina. Derniers bavardage avec Ma-bé et Mark, puis je pars vers la gare routière et grimpe dans un bus pour Guayaquil.
Quatre heures après, j’arrive dans une ville bourdonnante, sous une chaleur torride. J’ai choisi un petit hôtel non loin de l’aéroport, mon avion partant tôt le matin. Mais le quartier est un vrai labyrinthe, et je mets un moment à trouver la « Villa Maria ». Maria est charmante, ma petite chambre sans fenêtre un peu moins. Je passe un bon moment à écrire ces lignes, et passer en revue les documents nécessaires à mon voyage du lendemain. Puis je profite du radoucissement de la fin d’après midi pour marcher un peu. Nous sommes loin du centre ville, et le quartier n’a que peu d’intérêt. Mais il fait bon et mes pensées, qui sont déjà aux Galápagos, égayent le paysage. Après un mauvais repas dans une gargote locale, je rentre chez Maria, juste à temps pour regarder avec elle et son mari la deuxième mi-temps de Paraguay – Argentine. Le match finit à 1-1 après un but de Messi annulé pour une faute préalable de Nico Gonzales. Il ne m’en faut pas plus pour sombrer dans le sommeil. Une grande journée m’attend demain…
Grosses bises,
Julien