Mexique – Étape 43: Calakmul

Lundi matin, Xpujil. Jiovani passe nous prendre comme convenu. Dans son taxi, nous faisons la connaissance de Jaime et Chani, couple franco-mexicain de Chihuahua, en vacances au Yucatan. Jiovani est à la fois un puit de connaissance et un moulin à paroles. Avec un débit impressionnant, il évoque sans transition le projet de train maya pour la péninsule, la rivalité ancestrale entre Tikal et Calakmul, et la recette du conchinita pibil. Il s’interrompt lorsque surgissent de l’épaisse forêt jouxtant la route deux superbes paons, en pleine joute. Les magnifiques oiseaux sont la première des nombreuses surprises animales que la jungle nous réserve…Un great curassaw mâle, sorte de grosse dinde noire brushinguée, traverse la route à basse altitude, exhibant la glande jaune vif au-dessus de son bec. Plus loin, un jeune daim et sa maman marchent tranquillement sur le bitume, avant de disparaître dans les bois. De petits pécaris les imitent un peu plus tard. Un vrai safari !

Jurassic park

Qui continue une fois sur le site. Sur le chemin qui mène aux ruines, Arlette repère un toucan. Alors que je le cherche à l’aide des jumelles, je découvre sur le même arbre une famille de singe hurleurs en plein déjeuner ! Nous les regardons s’éloigner et poursuivons notre chemin, attentifs aux mouvements de la jungle.

La planète des singes hurleurs

Nos cousins simiesques mis à part, nous sommes les seuls bipèdes sur le site ! Quelle bonheur de fouler ces pierres antiques dans le silence de la forêt, rompu seulement par les nombreux geais bruns qui chantent de leur cri strident. Sur la place centrale, avant de gravir les marches des hautes pyramides qui s’élèvent au-dessus des cimes, nous nous installons au sommet d’un petit temple, afin de prendre un petit déjeuner de fortune, fait des indigestes viennoiseries industrielles trouvées la veille chez Willy.

Minecraft
The loud bird
That’s a loooooooooot of stairs

Nous grimpons ensuite au sommet de la structure Nord. Au bout de l’effort, je me retourne et découvre avec une intense émotion le paysage. De notre nid d’aigle, nous dominons une jungle qui s’étend à perte de vue. Face à nous, au Sud, le Guatemala, tout proche. De la ligne d’horizon se dégage une immense pyramide, somptueux îlot de pierre dans cette océan de verdure. Nous restons longtemps, assis sur notre perchoir, à contempler cette merveilleuse image.

Kipling
UFO
Charlotte en forêt
Happy feet

La poignée de touristes prenant la pose sur les marches du temple nous ramène au XXIème siècle, quand nos pensées vagabondaient à l’âge d’or de Calakmul, il y a plus de mille ans. Avec difficulté, nous parvenons à nous extraire de notre point de vue, et redescendons sur la terre ferme. Avant de retourner tutoyer les nuages au sommet de la pyramide que nous contemplions. Alors que nous entamons l’ascension, un bruit assourdissant survient des profondeurs de la forêt tropicale : les singes hurleurs sont dans la place. Cette musique animale m’avait manquée ! De notre nouveau mirador, la vue est toujours exceptionnelle, même si la structure que nous foulons ne peut entrer dans le décor.

En deux : Patrice Lafond – Marie-Ange Nardy
Selva
Sigiriya
Atmosphère atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?

Nous continuons notre exploration de ces lieus enchantés, par la visite d’un autre temple, plus modeste. Libres d’en arpenter les moindres recoins, nous nous régalons à nous perdre dans les couloirs et chambres encore intacts de l’édifice. Calakmul est l’unique site où les visiteurs disposent encore d’une presque totale liberté de mouvement, ce qui en fait un incroyable terrain de jeu !

Y’a du taf mais les murs sont sains
Là, on pourrait mettre le solarium

Une troisième haute pyramide dépasse des arbres un peu plus à l’Est. À son sommet, contemplant la jungle immense, je pense à Sigiriya, au Sri Lanka, autre site superbe et haut perché qui avait été une « highlight » de mon voyage là-bas. Un coup d’œil sur la montre nous indique que nous explorons la cité depuis près de quatre heures, et que Chani, Jaime et Jiovani nous attendent sans doute depuis un bon moment…Au petit trot, nous nous hâtons vers la sortie à travers la jungle campechoise. Chanceux que nous sommes, un superbe toucan keel-billed se pose sur une branche à deux pas du parking afin de nous saluer. Voilà qui ponctue une visite magique de la plus belle cité maya que j’ai vu jusqu’à présent !

Panthéon
Keel-billed II

Les festivités se poursuivent, puisque notre généreux chauffeur se gare au kilomètre 27, et nous entraîne dans la forêt jusqu’à un petit étang perdu dans les bois. Là, un petit crocodile trapu, presque noir, capte les rayons du soleil qui percent l’épaisse voute arborée. Placide, l’animal se laisse approcher de très près, et prend la pose pour quelques clichés. Tout près de lui se tient un drôle d’oiseau, aux allures d’ornithorynque. Le rigolo “boat-billed” heron vient compléter ma liste de birder. Suivi de près par son cousin le héron tricolore et son bec long et fin, qui pêche la truite non loin. Je suis heureux de ces découvertes, malgré les moustiques qui me dévorent les mollets.

Petit, mais costaud
Repérés…
Mr Burns

Sur le chemin du retour, je discute avec Chani, qui me raconte les difficultés d’intégration à Chihuahua, dans ce Mexique du Nord tiraillé entre les influences américaines et la quête d’une identité propre, puisant dans ces racines indigènes. Elle me dit aussi avoir trouvé un bon groupe d’amis, avec lesquels elle partage hebdomadairement un temascal. Ils sont fous ces expats.

Spider monkiki

Jiovani nous dépose à Xpujil, après m’avoir donné quelques tuyaux rouillés pour rejoindre Palenque, notre prochaine destination. Nous ne suivons ainsi pas son plan, et prenons un bus ADO jusqu’à la ville passante d’Escarcega. Il est déjà tard, et nous convenons de passer la nuit ici avant de prendre un autre bus pour Palenque le lendemain. Nous prenons nos quartiers dans un superbe hôtel de style IBIS, au bord de l’autoroute et à côté d’une station service. Mais le confort est au rendez-vous, et le restaurant “Mi Ranchito”, en face, sert une “birria” de qualité. Je précise ici que la birria est une soupe à la viande de bœuf et non une bière. Fatigués après une journée magnifique et intense, nous rejoignons en pensée notre perchoir de Calakmul, avant de se laisser engloutir par le sommeil.

Vous ne viendrez plus chez nous par hasard

Mardi matin, Escarcega. Reposés après une nuit étonnamment calme dans notre hôtel au bord de l’autoroute, nous marchons vers le centre-ville afin de trouver un moyen de transport pour rejoindre Palenque, à trois heures de route. Nous cherchons d’abord un endroit où petit-déjeuner, ce qui s’avère ardu. Nous trouvons tout de même le “Café Mary” et ses deux tables hors d’âge sur le trottoir. Une jeune femme se cache derrière son comptoir, et ne bouge pas d’un cil, espérant qu’ainsi nous ne la verrons pas. Mais notre vision n’étant pas basée uniquement sur le mouvement (contrairement au Tyrannosaure), elle réalise que sa ruse ne fonctionne guère et qu’elle va devoir servir des clients. Un comble pour un restaurateur. Le café d’oya est correct, mais les assiettes de huevos rancheros, qui arrivent avec dix minutes d’intervalle, ne sont guère appétissantes. Nous convenons avec Arlette de ne pas lui en tenir rigueur, puisque la jeune femme a pour sûr foule de circonstances atténuantes : c’est son premier jour, le cuisto s’est fait porter pâle à la dernière minute, son mari a encore uriné sur la cuvette, sa belle-mère vient de s’installer à la maison pour une durée indéterminée, et franchement, vivre dans ce trou d’Escarcega, ce n’est pas une sinécure. Elle ne s’émeut pas, sans surprise, de nos sourires compatissants, et file se camoufler à nouveau derrière son comptoir.

Après ce rustique et amusant desayuno, nous rejoignons le terminal des collectivos. Là, un homme affable malgré sa dentition à la Joey Starr nous explique la marche à suivre pour atteindre Palenque : trois collectivos successifs, et un taxi pour finir. Sinon il y a aussi un bus direct tout confort. Voilà qui semble une belle option. Nous refaisons ainsi les quatre kilomètres nous séparant de notre hôtel, puisque la gare ADO est en face. Ponctuel, le car arrive à 13h20, et nous dépose quelques trois heures plus tard à Palenque. Je retrouve vite mes repères dans cette ville où j’ai passé de bon moments fin février. À commencer par les rayons du Chedraoui local, où nous faisons le plein de bonnes choses pour les deux prochains jours. Les bras chargés de provisions, nous hélons un taxi qui nous dépose quelques minutes plus tard chez Rodolfo et Adelie, nos hôtes. En plein cœur de la jungle, leur maison est splendide ! Le jardin est immense, fraîchement tondu, parsemé de grands arbres aux fruits et fleurs odorantes. Une petite mare et un terrain de tennis s’ajoutent au décor. La Casa est aussi fascinante ! Terrasse ombragée avec vue sur le jardin, cuisine toute équipée, et une grande pièce ronde et haut de plafond qui distribue des chambres confortables et lumineuses. Le couple est éminemment chaleureux, et nous accueille avec sourire et simplicité. Un petit tour du jardin et nous sommes définitivement sous le charme de l’endroit : des agiles agoutis courent aux quatre coins de la propriété, les oiseaux sont partout, et un petit crocodile nage au milieu des tortues à la surface de l’étang. Merveilleux !

En sous-marin

Nous nous attelons ensuite à la préparation des « chiles rellenos », poivrons farcis au fromage, épinards, et champignons. Nous dégustons notre dîner sur la terrasse, en regardant les orages qui sévissent au loin, dont les lumières dansent à travers les nuages.

Eden

Je vous embrasse !

Julien

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